« Toute personne a le droit de circuler librement et de choisir sa résidence à l’intérieur d’un Etat. »
Ainsi commence l’article 13 de la Déclaration universelle des droits de l’homme du 10 décembre 1948 dont l’Abbé Pierre a été co-rédacteur et qui fut adoptée par les 58 Etats Membres dont la France.
Depuis quelques jours, les forces de gendarmerie viennent dans les communautés Emmaüs (Grenoble, Rodez 2 fois, notamment) arrêter des compagnes et compagnons faisant l’objet d’une OQTF (Obligation de Quitter le Territoire Français) afin de les placer en centre de rétention et, pour les derniers cas, un jugement de retour vers leur pays d’origine.
Les communautés Emmaüs ont comme principales valeurs l’accueil inconditionnel, l’équité, le partage et la solidarité. Nous les pratiquons quotidiennement afin de servir le plus souffrant, de remettre des êtres humains debout et d’être au service des autres, toujours et pleinement.
La France a adopté depuis 71 ans cet article 13. Hier et aujourd’hui, l’Etat français bafoue sa propre parole, dénie ses propres engagements et préfère des options géopolitiques, économiques et, à l’heure actuelle, très certainement électorales au détriment de personnes dont le seul « crime » est de ne pas posséder les papiers nécessaires pour l’instant.
Un exemple : Rosa, compagne à Grenoble, actuellement détenue à Lyon et jugée avant-hier à retourner dans son pays alors qu’elle est depuis plusieurs années au sein des communautés Emmaüs sans enfreindre aucune loi et en participant de manière active au sein du territoire dans lequel elle habite.
Le préfet de l’Isère invoque notamment le fait qu’elle n’ait pas d’attache familiale car en instance de divorce.
En omettant que cette procédure de divorce est la conséquence de maltraitance sévère de la part de son mari.
Rosa, si je vous comprends bien, monsieur le préfet, aurait dû, pour obtenir plus facilement sa régularisation rester sous la coupe d’un mari violent et peut-être, à terme, homicide ?
Nous n’admettons pas ces arrestations alors que nos compagnes et compagnons mènent une vie, au sein de nos communautés, tranquille sans souci aucun avec les forces de l’ordre ou la justice.
Elles et ils participent au bien-être du territoire dans lequel elles et ils habitent.
Les communautés Emmaüs sont là pour accueillir celles et ceux dont, très souvent l’Etat se désintéressent ; elles pratiquent, grâce notamment au travail de celles et ceux que vous arrêtez aujourd’hui, une solidarité locale, nationale et internationale très active et très forte. Eh oui !!! Les plus humbles, les plus souffrants, les plus « pauvres » sont ceux qui aident le plus leur prochain.
En tant que vice-président d’Emmaüs France pour les communautés et aussi compagnon d’Emmaüs, je déclare que nous n’acceptons pas cette politique du haro sur le plus souffrant et le plus faible.
Nous n’acceptons pas que certains préfets ne respectent pas totalement la loi alors qu’elle a été votée, notamment la loi entrée en vigueur le 1er mars 2019sur les possibilités de régularisation.
Nous n’acceptons pas que soit bafoué quotidiennement l’article 13 et que l’Etat français soit depuis 71 ans un Etat sans respect de sa parole sur ce sujet.
Nous prendrons dès maintenant toutes les mesures nécessaires pour protéger les plus souffrants, les plus démunis, les plus délaissés.
Nous mettons le principe d’humanité au-dessus de toutes les lois humaines qui nous semblent mettre en danger les personnes.
Nous demandons que cessent ces arrestations et que les personnes qui vivent tranquillement sur le territoire français en participant activement à son enrichissement ne soient plus inquiétées.
Michel FREDERICO
Compagnon d’Emmaüs
Vice-président d’Emmaüs France